C’est un sujet qui me trotte dans la tête depuis un petit moment. Le matra des marketers : « avoir le bon message à la bonne personne au bon moment » est-il vraiment une logique imparable pour les marketers et les publicitaires.
Zéro déperdition est-il le top de toutes actions de communication ?
Tous les acteurs de l’industrie publicitaire vous le dirons : cibler c’est le nerf de la guerre. Il ne peut y avoir de stratégie sans l’identification d’une cible précise et claire. Là dessus, il n’y a pas de doute. Mais la logique publicitaire est amenée depuis quelques années, avec les évolutions technologiques, de s’engager sur les résultats des dispositifs proposés. Le digital a fait accélérer cet engagement sur les résultats. Oubliant parfois que le concept publicitaire, l’emplacement ne sont qu’une partie de la clef de succès. Si le produit est bon et répond à un besoin ou une attente, c’est aussi un élément déterminant. Dans tous les dispositifs nous avons une partie des personnes exposées aux messages qui ne sont pas dans la cible de choix. Et qui pourtant, un jour deviennent consommateur du produit ou du service proposé. C’est souvent ce que l’on appelle la déperdition positive, qui est rarement mesurée par les marketers.
Les stratégies court-termistes sur le digital nous poussent vers un traitement exclusif du bas du tunnel de conversion.
Les plus Roistes d’entre nous auront à coeur de rendre une copie parfaite dans l’efficacité des dispositifs proposés. Cette posture, de premier de la classe, nous fait vite oublier que le consommateur n’est pas une machine simple et facile à convaincre. Notre instinct, et notre zone cérébrale reptilienne nous revient très souvent, pour nous faire réagir différemment. 80% de nos décisions sont faites en grande partie par la partie émotionnelle de notre cerveau. L’émotion est plus souvent au coeur de nos décisions d’achats que les marketers les imaginent. Le digital et les analyses poussées des statistiques les forcent sur les derniers instants avant l’acte. C’est un peu trop facile, non ?
Ok, les lois statistiques des adservers vous prouveront le contraire ! Mais vouloir être obsédé par le rendement à court terme des dispositifs nous fait un peu oublier qu’avant d’être un acheteur compulsif, nous sommes des individualités parfois collectives remplies de valeurs émotionnelles. Si on aime pas, on achète pas, non ? Traiter uniquement les personnes qui hésitent ou sont sur le point de passer à l’acte est une chose essentielle dans nos métiers de marketers, mais vouloir convaincre et persuader est aussi un enjeu important de notre industrie.
La publicité digitale doit rester un acte de communication qui prend en compte les valeurs émotionnelles.
Les publicitaires ont un rôle important dans le digital qu’ils doivent beaucoup plus assumer. Ce n’est pas parce que le digital est un média de ciblage par essence, qu’il faut oublier sa capacité à faire de l’image et faire vivre de l’émotion aux consommateurs. Oui la TV reste (en France encore) un media de masse capable de porter des émotions rapidement. Mais le digital prouve jour après jour sa capacité à remplir aussi ce rôle. L’impact et l’influence des autres à travers les réseaux sociaux et toutes les autres formes d’influences que l’on peut trouver, prouvent que le digital a un rôle à jouer dans la considération et dans la connaissance des offres. Si vos ami(e)s vous racontent une mauvaise expérience, vous serez certainement moins enclin à aller vers la marque incriminée…ou alors vous aimez le risque…
Ce que les annonceurs n’ont pas encore réalisés sur le digital, c’est peut-être la valeur de l’émergence nécéssaire dans les dispositifs pour faire ce travail de notoriété et de considération de manière massive. Combien d’annonceurs sont restés sur les valeurs budgétaires d’il y a 3 ans au moins ? Le budget « digital » nécéssaire pour émerger n’est pas un petit investissement aujourd’hui. La TV le fait certainement plus facilement et simplement. Et on préfère cantonner le digital dans son rôle de convertisseur du dernier moment, de l’impulsivité ou de complémentarité. Ce rôle lui va bien, mais les spectateurs fragmentant de plus en plus leurs consommations des médias, cela deviendra de plus en plus difficile de ne pas utiliser aussi le digital comme un élément central et massif dans la notoriété de la marque. Cela peut aussi expliquer pourquoi Facebook et google pèsent 70% du marché aujourd’hui.
Le bon message à la bonne personne au bon moment reste quand même un idéal marketing.
Il faut certes considérer la valeur de l’efficacité dans les dispositifs. Mais dans tout acte de communication il y a une part d’image, d’émotion qui pousse à la vente. La vision concentrique des modèles d’optimisation, voir des algorithmes ne peut être la seule réponse à la gestion de l’efficacité. La programmatique a mis l’accent sur ce ciblage au bon moment à la bonne personne, mais dans les faits, la mécanique va chercher du volume de contacts en premier. Ne serais-ce que pour avoir suffisamment de données collectées pour cibler ensuite…
L’intelligence artificielle pourra certainement palier les aspects plus émotionnels, mais le fruit du hasard et de l’intelligence humaine reste la part la plus séduisante de nos métiers de publicitaires. On commence à voir émerger des données qui tiennent compte des aspects psychométriques des individus ou des données qui permettent d’identifier anonymement votre état émotionnel. Mindlytix est une start-up qui propose ce genre de technologie avec un certain intérêt. Garant que la publicité apparaisse au bon moment, car rien n’est moins flippant que de se savoir épié, telle une proie. Il faut peut-être aussi considérer que la publicité doit transformer le consommateur en prédateur…Mais tout cela est une question primitive.
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